Qu’est-ce qu’un milieu?

Richard Beaudet, éthologue

La gestion de l’espace par les animaux

Groupe de perroquets.

L’organisation sociale exerce une influence sur la façon dont l’espace est utilisé par les individus ou par le groupe, s'il s’agit d’une société. Les différents types d’organisation sociale peuvent être mis en parallèle avec la notion de territoire:

  • Les animaux vivant en solitaire et ceux qui vivent en couples stables ont un comportement territorial.
  • Ceux qui vivent en société peuvent dans certains cas avoir un comportement territorial, mais cette attitude est l’affaire du groupe, plutôt que de chaque individu.

La description de l’utilisation de l’espace par les animaux ne se résume pas au concept de territoire. Nous pouvons identifier plusieurs niveaux de gestion de l’espace, desquels nous tirons la classification suivante.

Nous pouvons considérer qu’il existe des espaces primaires qui sont chargés d’une signification émotive par l’animal, ils sont en quelque sorte son prolongement. Les espaces secondaires couvrent des surfaces beaucoup plus grandes, mais n’ont plus de signification émotive.

Les espaces primaires comprennent:

  • Le territoire
  • La zone sécuritaire
  • L’espace social
  • L’espace personnel

Les espaces secondaires comprennent:

  • Aire vitale
  • Domaine (vital)

La gestion de l’espace peut être l’affaire d’un individu de même que celle d’un groupe social. Ainsi, le territoire peut appartenir à un individu ou être la propriété d’un groupe.

Tableau de l'aire totale.

 

L’acquisition de nourriture est un des principaux bénéfices. Il y a deux facteurs qui influencent la superficie du territoire.

  • La taille de l’animal. Les besoins sont proportionnels à la grosseur de l’animal.
  • Le régime alimentaire. Certains aliments sont plus dispersés que d’autres. Cela nécessite un territoire plus grand. Si la nourriture est abondante et concentrée c’est l’inverse.
     

Finalement, les territoires contiendraient juste le nécessaire, car un espace trop vaste entraînerait trop de dépense. C’est à dire une dépense trop élevée pour le peu de nourriture.

Les stratégies de défense chez de nombreuses espèces tiennent compte de l’abondance des ressources alimentaires. Par exemple, il existe deux types de seuil: le seuil supérieur et le seuil inférieur. À l’intérieur de ces seuils, l’animal défend et garde son territoire. À l’extérieur de ces deux types de seuils, l’animal quitte son territoire.

  • Pour certaines espèces, il y a abandon immédiat plutôt que se dépenser à défendre un territoire trop populeux (trop d’intrus).
  • L’animal défend son territoire, mais il ne peut plus subvenir à ses propres besoins. Il va éventuellement le quitter.

Les animaux utilisent différentes stratégies pour préserver leur territoire.

1. À l'intérieur d'une même espèce

Par exemple, chez les oiseaux:

  • Le cri est un signal à longue portée pour dissuader les intrus (mésanges).
  • La parade est un signal de moyenne portée pour repousser les intrus.
  • La chasse ou l’attaque qui est utilisée seulement si l’intrus persiste à s’approcher.

Par exemple, chez les mammifères:

  • Les marques odorantes sont utilisées pour avertir l’intrus que le territoire est occupé.
  • Les attitudes d’intimidation.
  • La riposte ou l’agressivité s’il n’y a pas d’autres alternatives.

La défense est alors un comportement destiné à éviter à un animal d’être blessé ou attaqué par un autre animal. À l’intérieur de l’espèce, la défense est pour garder un territoire et pour préserver la tendance sociale.

2. Le comportement de défense contre les prédateurs est différent et comprend deux types de défenses.

A. Ce type de défense est présent sans qu’il y ait un prédateur sur le territoire. Elle diminue les chances de rencontre avec un prédateur.

  • Les animaux qui habitent des trous, crevasses, terriers (taupes, lapins).
  • Les animaux qui se camouflent (perdrix).
  • D’autres possèdent des attributs dangereux ou déplaisants par des couleurs brillantes (l’abeille).

B. N’opère qu’après avoir repéré un prédateur, ce qui augmente les chances d’échapper à la rencontre avec un prédateur.

  • La retraite (le lapin se retire dans son terrier).
  • La fuite en courant, sautant, nageant ou en volant.
  • La ruse (simulation de la mort parce que certains prédateurs s’intéressent seulement aux proies en mouvements).
  • La déviation d’une attaque où la proie détourne l’attention du prédateur (parade du pluvier).
  • La riposte qui est l’ultime défense et le dernier recours après la menace.
  • Les animaux, en général, subissent fortement l’influence du milieu. Leur comportement se trouve alors modifié. Ces modifications commencent dès la naissance et même avant la naissance.

Les perroquets, dans des conditions naturelles, choisissent leur partenaire sexuel et s’accouplent pour la vie. En captivité, le choix est limité. D'ailleurs, plusieurs éleveurs imposent un partenaire. En plus, on les enferme dans une minuscule volière, incapables de fuir ni même de se cacher.
Cette situation d’une exclusion se voit aussi chez des propriétaires. Certains d’entre eux le font par manque de connaissance et d’autres le font de manière égoïste.

Conditions de contrainte

Modèle hydrolyque de Lorenz:

Comportement inné chez le perroquet.

Selon ce modèle, l’énergie ou l’eau s’accumule dans un réservoir qui est "l’action spécifique d’énergie". Cette accumulation d’énergie stimule et dirige un comportement pour rechercher le stimulus déclencheur. Une fois trouvé, le stimulus déclencheur et l’accumulation permettront d’ouvrir la valve de pression ou le IRM (mécanisme de déclenchement du comportement inné). L’énergie ou l’eau s’écoulera et nous obtiendrons un comportement instinctif ou un FAP.

Par contre, si le stimulus déclencheur est moins important que l’accumulation d’eau dans le réservoir, nous pourrions ainsi observer un comportement sans la présence de stimulus déclencheur. Ce que l’on appellerait : Vacuum Activity (par exemple, l’agressivité). L’animal retrouve son équilibre en évacuant l’excès énergétique par des réponses comportementales (souvent il n’y a pas de lien avec les comportements de l’éthogramme).

Donc, il est nécessaire d’avoir deux conditions pour ouvrir la valve de pression: de l’énergie et un stimulus déclencheur. Lorsque la valve de pression est ouverte et laisse se déverser l’énergie, celle-ci se déverse dans les comportements de l’éthogramme. L’énergie augmente jusqu’à ce que l’animal ait besoin de l’évacuer alors, il recherche un stimulus déclencheur afin d’exécuter un comportement qui lui permet d’évacuer son énergie.

De façon générale, chaque fois que l’animal est menacé ou sous tension et qu’il se trouve dans une situation conflictuelle, son corps et son cognitif subissent un stress. La menace ou la tension peut être, à la fois, physique, cognitive ou sociale (ou un mélange des trois). Mais si la pression ou le conflit est très puissant pour occasionner une dépense d’énergie biologique (le réservoir), cognitive (approche/évitement), affective (peur ou anxiété) et comportementale (mécanisme de défense selon I/C), alors l’animal sera dans un état généralisé de stress.

Mécanisme de défense

Le mécanisme de défense est un apprentissage. Celui-ci possède toutes les caractéristiques liées à un conditionnement par association.

Par exemple:

Stimuli.

  • Si les réactions du mécanisme de défense subissent un renforcement provenant de l’environnement, la réponse est conditionnelle
  • Si les réactions du mécanisme de défense subissent un renforcement physiologique. La réponse est alors inconditionnelle.

Perroquet et mécanismes de défense.

DONC, la séquence comportementale du début à la fin, n’est pas la même d’un individu à l’autre. Rappelons-nous:

  • Le mécanisme de défense ou le seuil d’émotivité s’établit en bas âge et il est dépendant du milieu.
  • Un milieu enrichi aidera à l’établissement d’un seuil élevé.
  • Un milieu pauvre établira un seuil moins élevé.

Imaginez un animal qui a appris, en bas âge, diverses situations ou manipulations.
La séquence est conditionnelle.
Lorsqu’il s’agit d’une résolution de conflit

  • Où se situe cette séquence conditionnelle?

La peur ou l’anxiété

  • Il y a plus de chance qu’il s’agirait d’anxiété.
  • Si cela est le cas, l’agressivité sera offensive.
  • Il en est de même à l’inverse.
  • La peur est défensive.

Dans les deux cas, le mécanisme de défense influence directement l’intensité des aspects défensifs et offensifs.

Si l’éleveur procède à une socialisation optimale, cet animal sera davantage offensif que défensif. Ces apprentissages seront en étroite relation avec sa disposition innée à le faire (Lorenz). La disposition absente permettra le développement plutôt défensif. La juxtaposition est une autre option entre les deux types de développement du mécanisme de défense.

D’autre part, un animal dans un milieu pauvre en stimulations a plus de chance d’être peureux, même à l’âge de trois semaines. C’est le conditionnel du mécanisme de défense qui est présent. Cependant, nous voulons modifier en introduisant plusieurs stimulations différentes, l’animal n’a pas de disposition, les apprentissages deviendront inconditionnels.

 

 

© Richard Beaudet 2007

Photos
Cacatua alba, Jeanne Bessette
Pablo et Gazou, psittacus erithacus erithacus, CAJV
Doudou, cacatua galerita triton, et Paquita, ara ararauna, Mija Portail
Arianne, cacatua moluccensis, Christine Cadoux